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Atteintes digestives et non digestives de la maladie de Crohn

La maladie de Crohn atteint n'importe quel segment du tube digestif, mais plus particulièrement le grêle terminal (iléon) et le côlon.

Par le Dr Didier Mennecier

La maladie de Crohn atteint n’importe quel segment du tube digestif, mais plus particulièrement le grêle terminal (iléon) et le côlon. Parmi les patients 18 à 30% ont une forme iléale pure, 20 à 48% ont une forme colique pure, 12 à 44% ont une atteinte iléo-colique et 6 à 20% ont une forme touchant le tube digestif à n’importe quel endroit en amont du dernier mètre d’intestin grêle (Figure n°1 et 2).

Figure n°1 : Atteintes digestives de la maladie de Crohn
(Source A.D.A.M)

L’atteinte iléale isolée restera presque toujours iléale et inversement dans une forme colique pure, l’iléon est rarement touché secondairement. L’atteinte ano-périnéale est observée initialement chez moins d’un quart des patients et à un moment ou un autre de l’évolution chez environ 50% d’entre eux.

L’atteinte du grêle se complique dans la maladie de Crohn de sténoses pouvant se compliquer d’une fistule et de perforation. Les formes iléocoliques tendent plutôt à se perforer alors que l’atteinte colique reste longtemps inflammatoire, sans sténose ni perforation.

Figure n°2 : Atteintes digestives de la maladie de Crohn
(Source A.D.A.M)

L’expression clinique des poussées dépend du siège des lésions : les formes coliques sont souvent bruyantes avec des manifestations extra-digestives fréquentes, alors que l’atteinte isolée du grêle peut ne donner aucun symptôme pendant des années et évolué silencieusement vers une sténose.

Quels sont les atteintes non digestives associées à la maladie de Crohn ?

Les manifestations articulaires

Ce sont les manifestations extra-digestives les plus fréquentes 25 à 30 % des patients porteurs de MICI souffrent de manifestations ostéo-articulaires. On distingue les atteintes périphériques (les membres) et axiales (le tronc).

Les atteintes périphériques sont les manifestations les plus fréquentes et affectent 20 % des patients. Toutes les articulations peuvent être touchées, mais le plus souvent se sont les genoux, les chevilles, les poignets, les coudes ou les articulations métacarpo-phalangiennes (doigts).
Ces symptômes articulaires peuvent précéder les manifestations digestives chez environ 20 % des patients, être concomitants dans 35 % des cas et apparaître après les signes digestifs chez 50 % des patients. Après un premier épisode articulaire, la récidive survient dans plus de 50 % des cas. Le traitement est avant tout celui des manifestations intestinales puisqu’elles évoluent parallèlement.
On distingue ainsi les arthrites pauci-articulaires (touchant moins de 5 articulations), qui évoluent parallèlement aux manifestations digestives et les arthrites polyarticulaires (touchant au moins 5 articulations) dont l’évolution n’est pas parallèle aux manifestations digestives.

Les atteintes axiales regroupent la sacro-iliite et la spondylarthrite

La sacro-iliite est caractérisée par une inflammation des articulations sacro-iliaques, parfois bilatérale mais volontiers unilatérale. Elle touche plus la femme que l’homme et se traduit par des douleurs lombaires basses associées à une raideur matinale qui s’améliore après une période de déverrouillage.
La spondylarthrite ankylosante est plus fréquente en revanche chez l’homme. Elle se manifeste par des douleurs du rachis survenant essentiellement le matin accompagnées d’une raideur.

Il existe aussi des douleurs au niveau des insertions des tendons. Un hypocratisme digital est possible chez 38 % des maladies de Crohn dont la présence est corrélée à l’activité de la maladie.

Les atteintes dermatologiques

L’érythème noueux est la manifestation cutanée la plus fréquente décrite dans 6 à 15 % des cas, qui réalise une éruption douloureuse, bilatérale, faite de papules surélevées, de nodules érythémato-violacés, fermes et mobiles par rapport aux plans profonds, de quelques millimètres de diamètre à plusieurs centimètres, prédominant sur les faces d’extension des bras et des jambes.

La prévalence de l’aphtose buccale est de l’ordre de 20 %. Il s’agit le plus fréquemment d’aphtes communs évoluant par poussées de 1 à 5 éléments, disparaissant en 1 à 2 semaines, sans laisser de trace. Ils siègent sur les lèvres, la face inférieure de la langue, les joues, le plancher de la bouche.

Le pyoderma gangrenosum s’observe chez 2 à 5 % des MICI avec atteinte colique, il siège le plus souvent au niveau des membres inférieurs, favorisé par un traumatisme. Il débute par une pustule qui s’étend pour constituer ensuite une profonde ulcération entourée d’un bourrelet violacé (Figure n°3).

Figure n°3 : Pyoderma gangrenosum dans la maladie de Crohn (Source GastroHep.com)

Les manifestations ophtalmologiques

Les manifestations ophtalmologiques surviennent dans moins de 10% des cas au cours de la maladie de Crohn, plus souvent en cas d’atteinte colique et iléo-colique qu’en cas d’atteinte isolée du grêle et plus fréquemment chez la femme que chez l’homme (Figure n°4).
Les manifestations oculaires sont le plus souvent une uvéite plus rarement une atteinte de la cornée. Nous ne parlerons pas des atteintes plus rares.

Figure n°4 : Uvéite dans la maladie de Crohn
(Source Sauge Gériatrica)

L’uvéite est une inflammation qui touche la partie antérieure de l’œil : l’iris (Figure n°4). Elle est souvent bilatérale. Elle peut être asymptomatique, se manifester par une simple gêne oculaire voire d’une vive douleur, une rougeur oculaire, une photophobie, un larmoiement. Elle est affirmée par l’examen à la lampe à fente montrant la présence de cellules et de particules inflammatoires flottant dans l’humeur aqueuse.

Les atteintes de la cornée sont rares. Elles se traduisent par une douleur oculaire, une irritation, une sensation de corps étranger parfois associées à une baisse de l’acuité visuelle. Le pronostic de ces lésions dépend en fait du contrôle de la maladie.

Les atteintes Biliaires

On estime que la prévalence de la Cholangite Sclérosante Primitive (CSP) est d’environ 9 % dans la Maladie de Crohn.
Sur un plan pratique, une coloscopie avec biopsies doit être réalisée systématiquement dans le bilan d’une CSP en raison du caractère possiblement asymptomatique de la colite. La prévalence de la maladie de la Maladie de Crohn au cours de la CSP varie de 1 à 17% selon les séries. Les Maladie de Crohn associées à une CSP ont la particularité de comporter constamment une atteinte colique. Il n’y a pas de corrélation entre la sévérité de la Maladie de Crohn et la sévérité de la CSP.


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