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Les effets de l’alcool sur l’organisme

L'alcool est un produit dont les effets varient en fonction de la quantité absorbée et de son mode de consommation.

Par le Dr Didier Mennecier

Les effets psychotropes

L’alcool est un produit dont les effets varient en fonction de la quantité absorbée et de son mode de consommation.

En prise aiguë : il est d’abord, pour de faibles doses, euphorisant et désinhibiteur avec une phase d’excitation psychomotrice avec parfois des comportements agressifs, puis apparaît, par l’augmentation des doses, une phase d’incoordination et d’instabilité psychomotrice pour conduire, à fortes doses, au sommeil voire au coma.

En prise chronique : l’alcool entraîne des dommages organiques (maladies du foie, du système nerveux, du pancréas, des cancers), des dommages psychiques (anxiété, dépression) et socio-familiaux (irritabilité, agressivité, violence, perte d’emploi, conflit, désinvestissement).

Les effets sur le système nerveux central

L’alcool agit sur toutes les cellules du cerveau (les neurones) en altérant leurs membranes par dissolution des graisses (phospholipides) qui les constituent. Leur fonctionnement s’en trouve modifié.

D’autre part, l’alcool modifie l’équilibre entre les hormones du cerveau (les neurotransmetteurs) qui régulent l’humeur, et l’échange des informations entre les neurones entraînant des effets excitateurs ou inhibiteurs.

Dans tous les cas l’alcool a un effet toxique – direct ou indirect – sur les cellules neuronales et sa consommation chronique perturbe leur bon fonctionnement, altère leur structure de façon parfois irréversible pouvant aller jusqu’à la mort de ces cellules (Figure n°1 ).

Figure n°1 : Les différentes atteintes de l’alcool sur l’organisme

Les effets sur le système nerveux périphérique

L’alcool est toxique pour les nerfs périphériques, essentiellement des membres inférieurs : les polynévrites (mais aussi des yeux : névrite optique)… Cela se traduit par des fourmillements et des troubles sensitifs des jambes, des douleurs parfois masquées par l’effet anesthésiant de l’alcool, des crampes, une sensation de pieds froids, une faiblesse musculaire, pouvant mener à une impotence avec difficultés de la marche (steppage).

Les effets sur les fonctions cérébrales

La consommation d’alcool régulière et excessive entraîne progressivement et avec aggravation dans le temps.

Des troubles cognitifs d’intensité variable : troubles de la mémoire, du raisonnement, de la concentration.
Une encéphalopathie de Gayet-Wernicke : état confusionnel avec troubles de l’équilibre qui peut régresser avec l’arrêt de l’alcool.
Une démence alcoolique (syndrome de Korsakoff) qui peut toucher des sujets dès l’age de 35-40 ans et qui ne régresse pas, sauf s’il est diagnostiqué précocement.

Les effets sur le foie

L’alcoolopathie hépatique peut exister sans alcoolodépendance (malgré une forte corrélation entre les quantités d’alcool absorbées et les dommages constatés). Elle peut apparaître avec des quantités minimes d’alcool, dès une consommation régulière quotidienne de 1 à 2 verres standard.

L’alcool induit deux types d’effets sur le foie : la stéatose et la cirrhose, maladie chronique dont les conséquences peuvent être mortelles. L’alcool est un facteur aggravant des hépatites virales (compétition avec les traitements), ou favorisant (contamination par des porteurs du virus lors de rapports non protégés).

La stéatose est le premier stade de la consommation chronique d’alcool. Il correspond à un dépôt de graisses à l’intérieur des cellules. Ces graisses sont des triglycérides. On les retrouve dans le sang à des taux anormalement élevés chez les consommateurs excessifs d’alcool.

Le foie augmente de volume (hépatomégalie). La stéatose régresse en principe à l’arrêt de la consommation d’alcool. En cas de poursuite de consommation excessive, l’étape suivante (la cirrhose) peut se déclencher chez 30 à 40% des sujets suite à l’apparition d’une fibrose hépatique.

La fibrose apparaît par la suite progressant vers une cirrhose hépatique entraînant des complications comme l’apparition d’une ascite (liquide dans l’abdomen), des varices dans l’œsophage pouvant se rompre et saigner (hématémèses), une encéphalopathie hépatique et vers une complication redoutable : le cancer du foie.

Le sevrage absolu en boissons alcoolisées est un élément obligatoire du traitement.

Les effets sur le pancréas

L’alcool est le premier facteur responsable de pancréatites en France.

Le pancréas a deux fonctions : sécrétion d’insuline et transformation des lipides (graisses) alimentaires. La prise d’alcool engendre des inflammations pancréatiques aiguës très douloureuses (pancréatites aiguës) qui peuvent se chroniciser (pancréatite chronique associant douleurs abdominales, diarrhées grasses, amaigrissement). La prise d’alcool serait responsable de 85% des cas de pancréatites chroniques.

Le traitement repose sur une alimentation équilibrée et sans alcool. L’abstinence améliore l’évolution de cette maladie.

Les effets sur l’estomac

L’alcool est agressif pour les muqueuses. Les effets classiques sont un reflux gastro-œsophagien (risque de cancer de l’œsophage) et des inflammations des muqueuses : gastrites. Cette inflammation favorise la malabsorption de la vitamine B1, et donc indirectement des troubles neurologiques.

Les effets sur le sang

Lors d’une consommation régulière et excessive d’alcool, on observe :

Une macrocytose, augmentation du volume des globules rouges (VGM) > à 98 u3 (Normale < 95 u3),
Une diminution du nombre des plaquettes sanguines et du taux de coagulation sanguine, augmentant les risques d’hémorragies graves ou de micro-saignements répétés avec constitution d’une anémie.

Les effets sur les vaisseaux et le cœur

La consommation d’alcool peut être responsable de 3 maladies cardio-vasculaires :

L’hypertension artérielle : elle peut apparaître à partir de 40 g d’alcool pur consommés par jour (4 verres). L’arrêt ou la forte réduction de la consommation d’alcool améliore l’efficacité des traitement et même parfois leur arrêt par retour de la tension artérielle à la normale.

Les troubles du rythme cardiaque : soit transitoires en cas d’alcoolisation aiguë (fibrillation auriculaire pouvant être grave) soit permanents en cas d’alcoolisation excessive chronique.

Les myocardiopathies : elles atteignent le plus souvent des hommes de 30 à 55 ans consommant plus de 60 g d’alcool (6 verres) par jour. Le patient se plaint de palpitations et d’essoufflement. Une insuffisance cardiaque se développe que l’arrêt de toute consommation d’alcool peut stabiliser et même faire régresser.

Les effets cancérigènes

Chaque année l’alcool est responsable de plus de 11.000 décès par cancer : soit 8 à 10 % de la mortalité cancéreuse française annuelle.

D’autant plus qu’il est associé au tabac, l’alcool favorise le développement des cancers, notamment ceux des voies aéro-digestives supérieures : bouche, langue, pharynx, larynx et œsophage.

Les grands buveurs excessifs encourent un risque jusqu’à 10 fois supérieur aux abstinents ; chez les grands buveurs/grands fumeurs, les risques sont au moins 40 fois plus élevés que chez les non buveurs/non-fumeurs.

Enfin des études semblent faire une relation entre alcool et cancer du sein.

Tous les risques augmentent proportionnellement à la dose absorbée dès une consommation de 1 verre-standard par jour, quel que soit le produit et en fonction d’une vulnérabilité personnelle non évaluable à priori.

Les effets sur la sexualité

Une petite consommation d’alcool peut diminuer les inhibitions ; cependant les vertus aphrodisiaques de l’alcool sont parfaitement imaginaires. En fait, la consommation chronique et excessive peut retentir sur la sexualité :

Chez l’homme, des troubles de l’érection et de l’éjaculation apparaissent. A un stade plus avancé, on note une diminution de la libido, voire sa disparition. On peut aussi constater des cas d’atrophie testiculaire avec stérilité, et une gynécomastie (augmentation du volume des seins).

Chez la femme, peuvent apparaître des troubles de la menstruation. Des recherches récentes montrent aussi des risques d’atrophie des ovaires, de l’utérus et des parois vaginales.

Alcool et Syndrome d’Alcoolisation Fœtale (S.A.F.)

L’alcool est un neuro-toxique en cas de grossesse. Il passe directement du sang maternel vers le fœtus par le cordon ombilical et le placenta.

Les risques pour le fœtus sont très élevés lors d’alcoolisations massives en début de grossesse (risques de malformations) et en cas de consommation régulière dans les deux derniers trimestres (retard de croissance, risques d’accouchement prématuré). L’alcoolisation de la femme enceinte est aussi responsable d’un grand nombre d’avortements et d’enfants mort-nés.

Chaque année, en France, naissent de 700 à 2.000 enfants (2 naissances sur 1.000) atteints d’un syndrome d’alcoolisation fœtale (S.A.F.) caractérisé par un retard psychomoteur et des anomalies physiques (osseuses, cranio-faciales), et environ 8.000 enfants porteurs d’altérations psychiques plus ou moins sévères liés aux effets de l’alcool sur le fœtus (E.A.F.) : troubles du comportement, instabilité émotionnelle, déficit intellectuel nuisant au développement ultérieur de l’enfant.

Il est fortement déconseillé aux femmes de consommer des boissons alcoolisées durant toute la durée de la grossesse.

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