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Signes cliniques de la maladie de Crohn

La Maladie de Crohn doit être évoquée devant toute diarrhée prolongée associée à des douleurs abdominales et une baisse de l’état général.

Par le Dr Didier Mennecier

Le diagnostic de Maladie de Crohn doit être évoqué devant toute diarrhée prolongée associée à des douleurs abdominales inexpliquées et une altération de l’état général.

Sur le plan biologique peut être mis en évidence un syndrome biologique inflammatoire associant une protéine C de l’inflammation élevée (CRP), une anémie associant un taux d’hémoglobine abaissée, des signes biologiques de malabsorption témoignant d’une atteinte du tube digestif qui n’absorbe pas les nutriments (albumine, calcium, cholestérol diminués).
Des signes extradigestifs peuvent apparaître.
Il est à noter qu’une petite taille sans contexte familial et/ou des antécédents familiaux de maladie de Crohn sont à prendre en considération.
Sur le plan sérologique, il s’avère que les anticorps anti-saccharomyces cerevisiae sont plutôt positifs dans la maladie de Crohn.

La maladie de Crohn peut-être évoquée dans trois autres situations cliniques : au décours d’une diarrhée aiguë, d’une iléite aiguë ou d’une atteinte isolée du grêle. Dans ce contexte, la maladie de Crohn est un diagnostic d’élimination que seule l’évolution et la surveillance permettront de poser. Le médecin aura donc une conduite à tenir thérapeutique bien définie que nous allons détailler.

La maladie de Crohn peut-être découverte au décours d’une diarrhée aiguë.

Une maladie de Crohn débute dans 10 à 20 % des cas de façon aiguë, du jour au lendemain, comme une gastro-entérite. Votre médecin suivra un raisonnement pratique afin de ne pas d’emblée réaliser des examens complémentaires qui sont inutiles, car la majorité des diarrhées aiguës guérissent sous traitement symptomatique en moins de 3 jours. Il est à noter que 10 à 20 % des premières poussées de MICI semblent être déclenchées par une infection intestinale.

Figure n°1 et 2 : Colite infectieuse lors d’une diarrhée aiguë
par Campylobacter (Gauche) et Salmonelle (Droite)
(Source Atlas Atlanta)

Si la diarrhée persiste, votre médecin demandera une coproculture et un examen parasitologique des selles pour rechercher la bactérie ou le parasite responsables. Il pourra d’emblée débuter un traitement par une antibiothérapie de type ciprofloxacine (1g/j pendant 3 à 5 jours) qui est efficace sur la plupart des bactéries potentiellement responsables d’iléo-colites. Les examens des selles sont souvent négatifs.

C’est si la diarrhée persiste malgré le traitement, qu’il faut réaliser des examens endoscopiques nécessaires pour voir le colon et réaliser des biopsies.

La maladie de Crohn peut-être découverte au décours d’une Iléite aiguë.

L’iléite terminale aiguë et isolée doit faire discuter le diagnostic de première poussée de maladie de Crohn, mais aussi celui d’une infection intestinale à Yersinia, dont l’atteinte iléale terminale isolée est une forme anatomique de prédilection.
Le diagnostic de yersiniose iléale repose sur la culture de la bactérie à partir des selles et/ou des biopsies muqueuses iléales. Ces dernières peuvent êtres négatives. En pratique, votre médecin vous prescrira un traitement antibiotique par quinolones pendant 3 à 5 jours. La persistance de lésions iléales ou d’une symptomatologie identique après le traitement orientera plus vers une maladie de Crohn.

Figure n°3 : Ulcération (Flèche) au niveau de la valvule de Bauhin (Source Gastrolab)

La mise en évidence d’une atteinte du grêle doit faire évoquer en premier lieu une maladie de Crohn.

En cas d’atteinte isolée d’un ou de plusieurs segments de l’intestin grêle, le diagnostic de maladie de Crohn du grêle peut être évoqué si on confirme que les lésions existent depuis plus de 6 mois et que les examens radiologiques et endoscopiques mettent en évidence des ulcérations de la muqueuse, des sténoses associées à des dilatations.

Figure n° 4 : Sténose (Flèche) de l’iléon sur un transit du grêle (Source Klinikmanual.de)

Le Diagnostic différentiel avec la tuberculose est parfois difficile

Fréquente au début du vingtième siècle, la tuberculose intestinale était devenue rare dans les pays développés mais il existe une réascension actuelle en particulier en milieu urbain, est liée notamment à la pandémie par le VIH et à l’émergence de bacilles multirésistants.

Une fois présentes dans l’intestin, les mycobactéries résident préférentiellement dans la sous-muqueuse. La région iléo-caecale est le site électif des atteintes tuberculeuses intestinales. Les localisations tuberculeuses coliques segmentaires uniques ou multifocales, ne comportant pas une atteinte iléo-caecale associée, représentent 10 à 25 % des cas de tuberculose intestinale.
Le tableau clinique de tuberculose colique comporte presque toujours des douleurs abdominales. L’altération de l’état général est habituelle. La diarrhée, parfois hémorragique, est inconstante surtout dans les formes iléo-coliques droites. La fièvre est fréquente. Une masse de la fosse iliaque droite est palpée dans 50% des cas.

La tuberculose intestinale peut donc représenter un piège diagnostique avec la maladie de Crohn quand l’infection ne survient pas sur un terrain à risque et quand elle n’est pas associée à une tuberculose pulmonaire active.

Les arguments de certitude du diagnostic de tuberculose intestinale (bacilles acido-alcoolo-résitants) à l’examen direct des biopsies sont presque toujours absents au moment du diagnostic initial.
Les cultures de biopsies intestinales sur milieu de Lôwenstein sont positives tardivement (dans 40 % des cas).

Les granulomes tuberculeux sont typiquement plus gros que ceux de la maladie de Crohn. Ils siègent essentiellement sous les ulcérations et sont volontiers confluents et sont absents en zone muqueuse non inflammatoire. Ils contiennent du caséum (signe spécifique) dans 50% des cas.

L’IDR à la tuberculine est positive dans 50 % des cas. Le dosage du Quantiféron très spécifique peut aider au diagnostic. En cas de doute diagnostique un traitement d’épreuve anti-tuberculeux est justifié.


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