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Cirrhose compliquée : Ascite

L'ascite est une accumulation de liquide dans la cavité péritonéale qui témoigne d'une complication d'une cirrhose hépatique.

Par le Dr Didier Mennecier

L’ascite est une accumulation de liquide dans l’abdomen qui apparait comme une complication d’une cirrhose du foie. Elle apparait dans la cavité péritonéale lorsqu’il existe à la fois une hypertension portale et une insuffisance hépato-cellulaire. Elle témoigne d’un tournant évolutif de la maladie.

L’ascite se développe chez 30 % environ des patients ayant une cirrhose. Elle peut évoluer vers une ascite réfractaire dans 10 % des cas voir même dans 4 à 10 % vers un syndrome hépatorénal.

Diagnostic d’une ascite

L’ascite peut s’installer de différentes manières. Soit elle apparaît rapidement lors d’une hémorragie digestive qui entraine une décompensation œdémato-ascitique et qui démasque la maladie. Soit l’ascite apparait d’une façon progressive alors précédée d’un météorisme abdominal. En général, si elle est isolée, elle bien tolérée, elle est responsable d’une sensation de pesanteur abdominale qui s’accompagne d’une prise de poids et d’une augmentation du périmètre ombilical.

Examen clinique

Si l’ascite est de grande abondance, elle est mal tolérée et souvent responsable d’un essoufflement (dyspnée). L’inspection met en évidence une distension de l’abdomen avec une peau tendue et lisse. L’ombilic est déplissé. La percussion retrouve une matité de tout l’abdomen (Figure n°1).

Figure n°1 : Présence d’ascite dans la cavité péritonéale

Si l’ascite est de faible ou de moyenne abondance on ne retrouve qu’une matité des flancs sur le patient qui est mis en décubitus dorsal. Cette matité se déplace vers le flanc déclive en décubitus latéral : c’est donc une matité déclive et mobile. Attention, pour obtenir une matité déclive il faut au moins un volume d’ascite de 1,5 litres. (Figure n°2).

Figure n°2 : Principe de la matité déclive en décubitus latéral si présence d’ascite

On recherche à la palpation le signe du glaçon qui correspond au fait que lorsque nous appuyons fortement sur la paroi abdominale l’ascite par choc refoule le foie qui flotte et qui revient en entrainant un choc en retour au niveau de la main qui a appuyé.

Nous pouvons aussi observer le signe du flot. Si l’on donne un choc sur un flanc cela déclenche une onde liquidienne qui peut être perçue à distance qui correspond à l’onde qui été transmise par l’ascite

Parfois il peut apparaitre une extériorisation d’une hernie ombilicale ou inguinale qui amène à découvrir l’ascite.

Examen radiologique

L’Abdomen Sans Préparation (ASP) met en évidence une grisaille diffuse qui masque l’air présent dans les anses de l’intestin grêle qui peuvent apparaître dans ce contexte distendues (Figure n°3).

Figure n°3 : Aspect de grisaille diffuse du à la présence d’une ascite sur un ASP

L’échographie abdominale peut mettre en évidence l’ascite sous la forme d’une lame (Figure n°4-A) et est donc très surtout utile en cas d’épanchement de faible abondance, montrant alors une image liquidienne hypo-échogène caractéristique autour du foie et de la rate.

Le Scanner Abdominal, objective avec plus de précision la présence de liquide dans la cavité péritonéale sous la forme d’image liquidienne hypodense autour du foie et de la rate (Figure n°4-B)

Figure n°4 : A – Échographie hépatique – B – Scanner Abdominal – * Ascite

Ponction d’ascite

La ponction d’ascite nécessite une asepsie rigoureuse. L’aiguille est introduire au niveau du 1/3 externe de la ligne reliant l’ombilic à l’épine iliaque antéro-supérieure gauche, après désinfection large de la paroi abdominale (Figure n°5 A et B).

Figure n°5 : A– Repères pour la ponction d’ascite entre l’ombilic et l’épine iliaque antéro-supérieure – B – Ponction

Le liquide obtenu à la ponction est le plus souvent un liquide jaune citron mais l’aspect macroscopique est très peu spécifique et ne peut en aucun cas se substituer à l’analyse biochimique et cytologique.

Analyse du liquide d’ascite

L’examen de première intention est l’analyse du taux de protides. Le seuil de 25g/L est retenu pour discriminer exsudat (taux de protides >25g/L) et transsudat (taux de protides < 25 g/L). L’ascite de la cirrhose est habituellement pauvre en protides et est donc un transsudat.

Il est utile de calculer le gradient d’albumine entre le sérum et l’ascite (différence entre le taux plasmatique d’albumine et le taux en protéines de l’ascite) qui, s’il est > 11 g/L, est très spécifique d’une ascite liée à une cirrhose (Tableau n°1).

Tableau n°1 : Comparaison du taux de protides du liquide d’ascite des différentes pathologies initiales

Le comptage des polynucléaires (Analyse cytologique) doit être réalisée systématiquement pour écarter une infection spontanée du liquide d’ascite, complication fréquente de la cirrhose qui est asymptomatique dans plus de 20% des cas. En effet, seule l’ascite de la cirrhose peut s’infecter spontanément et elle peut mettre en jeu le pronostic vital à court terme. Tout retard de diagnostic peut s’accompagner d’une augmentation de la mortalité.

L’infection spontanée du liquide d’ascite est définie par un taux de polynucléaires neutrophiles (PNN)> 250/mm3 en l’absence de toute infection intra-abdominale contiguë. En cas de liquide hémorragique, il faut demander un dosage de l’hématocrite qui écarte un hémopéritoine s’il est < 1%. Un taux très élevé de PNN (plusieurs milliers/mm3) devra faire rechercher une perforation d’organe creux.

Une Analyse bactériologique doit-être de principe demandée. On réalise systématiquement un ensemencement dans des flacons d’hémocultures aéro et anaérobie et sur milieu de Löwenstein. Le milieu Löwenstein est un milieu de culture pour la culture du Mycobacterium tuberculosis.


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